Bouger en harmonie avec le courant

Texte lu par Marie-Françoise au Mans jeudi 27 janvier 2022

J’ai eu souvent l’occasion de pratiquer le canoë et j’aimais tout particulièrement pagayer dans les courants étroits et rapides de la Nouvelle Angleterre.

Si vous vous abandonnez au flot de ces rapides courants, votre canoë va s’écraser sur un rocher ou vous allez vous retrouver en sens inverse du courant, et votre embarcation sera submergée. Le courant est assez puissant pour écraser votre canoë, mais si vous avez compris le sens du courant, vous pouvez bouger en harmonie avec lui. Vous pouvez danser avec lui, glisser doucement autour des rochers et pivoter autour des remous.

Vous pouvez faire tout ça sans d’énormes efforts mais « s’abandonner au flot », il n’en est pas question. C’est un engagement actif avec les forces naturelles, fondé sur une connaissance intime de ces forces, qui permet de se mettre en accord.

S’abandonner passivement au flot de l’existence n’est pas ce à quoi le Bouddha invite quand il parle d’acceptation. La voie du Bouddha recommande d’accepter la vie telle qu’elle est, de recevoir les choses telles qu’elles sont avec un esprit et un cœur largement ouvert, et dans un engagement actif avec la vie.

Et s’il vous arrive de passer dans un secteur où l’eau est calme, vous pouvez l’apprécier paisiblement, sachant de façon sûre que ça va bientôt changer.

Jisho Warner

Toutes les choses participent à notre existence

Texte lu par Marie-Françoise au Mans jeudi 20 janvier 2022

Un des visiteurs demanda un jour au Bouddha pourquoi les moines qui l’entouraient étaient si paisibles. « C’est parce qu’ils ne soupirent pas après le futur et ne cherchent pas à revivre le passé, mais se contentent de supporter le présent », répondit-il. En effet, la clé consiste à rester dans le présent. Une fois que nous avons appris comment l’approcher, nous faisons de l’instant présent notre nourriture.

On peut pratiquer l’intimité avec le moment présent en prenant conscience de la manière dont les choses, autour de nous, participent à notre existence. Nous devons accorder le plus grand respect et la plus grande attention à tout ce que nous faisons. Généralement nous divisons notre temps en plusieurs catégories : le travail, la pratique, les repas, la vie avec notre conjoint, nos enfants et, si possible, un peu de temps pour nous-mêmes ; mais avec le dharma (l’enseignement du Bouddha), le temps est tout entier pour nous-même ; tout ce que nous faisons est important, y compris les choses les plus insignifiantes. Il n’y a aucun temps perdu. En réalité, la pratique est toujours semblable, que l’on soit entraîné ou débutant. La seule chose à faire est de rester vrai devant l’expérience du moment.

Au cours de notre existence, il nous arrive souvent de nous dire : « Si seulement ceci ou cela n’existait pas je serais heureux. Si seulement je n’étais pas en colère, si seulement je ne devais pas laver la vaisselle, descendre la poubelle, faire ma déclaration d’impôts….si seulement je pouvais ne pas vieillir, ne pas être malade, ne pas mourir…. » Mais tout cela doit être accompli. Il en va ainsi. Et aucune de ces réticences ne doit nous écarter de notre pratique.

Pour être heureux, il faut nous abandonner complètement à l’expérience présente. Vivre dans son intimité.

Vivre à la lumière de la mort, de la vieillesse et de la maladie / Larry Rosenberg

Vivre pleinement votre vie

Texte lu par Marie-Françoise au Mans Jeudi 13 janvier 2022

Tout change. Pour la plupart des gens c’est très décourageant. On ne peut compter sur rien, on ne possède rien. On voit ce que l’on ne voulait pas voir ; on rencontre des gens qu’on n’aime pas. Si l’on se fixe un objectif, on découvre souvent qu’on ne l’atteindra pas. Les circonstances prennent donc souvent une tournure décourageante. En tant que bouddhiste, c’est le fondement même de votre vie que vous transformez. Avant, cette impermanence était la raison même de votre souffrance et de votre découragement. En changeant de point de vue et de façon de vivre, vous devenez capable d’apprécier votre nouvelle vie à chaque instant. La fugacité des choses devient la raison pour laquelle vous appréciez votre vie. Si vous pratiquez de cette façon, celle-ci devient stable et pleine de sens.

Libre de soi, libre de tout / Shunryu Suzuki

Abandonner l’espoir

Texte lu par Marie-Françoise au Mans jeudi 6 janvier 2022

L’absence d’espoir est le terrain de base. Autrement nous ferons le voyage avec l’espoir d’obtenir la sécurité. Si nous faisons le voyage pour nous rassurer, nous passons complètement à côté de l’essentiel. Nous pouvons pratiquer dans l’espoir d’obtenir la sécurité mais cela ne peut conduire qu’à la déception et à la douleur. Commençons ce voyage sans espoir d’avoir un terrain solide sous nos pieds. Commençons-le avec le non- espoir.

Ne pouvons-nous pas revenir à l’essentiel ? Se détendre dans le moment présent, se détendre dans l’absence d’espoir, ne pas s’opposer au fait que les choses ont une fin, que les choses passent, qu’elles n’ont pas de substance durable, que tout change tout le temps – c’est ça le message de base.

Parler de l’absence d’espoir, ça veut dire faire face aux faits. Aucune fuite de la réalité. Nous pouvons continuer à avoir des dépendances de toute nature, mais nous cessons de croire qu’elles sont autant de portes d’accès au bonheur.

Abandonner l’espoir est une incitation à demeurer avec nous-mêmes, à entrer en amitié avec nous-mêmes, à ne plus fuir, à retourner à l’essentiel quoi qu’il arrive. Si nous vivons à fond l’absence d’espoir en renonçant à toute lubie d’une quelconque alternative au moment présent, il est possible de connaître la joie dans la vie, d’établir une relation honnête et directe avec elle qui ne néglige plus la réalité de l’impermanence et de la mort.

Quand tout s’effondre / Pema Chödron